En dépit du bon sens !

www.lemonde.fr/politique/article/2019/02/21/au-diner-du-crif-macron-promet-des-actes-tranchants-pour-repondre-a-l-antisemitisme_5426022_823448.html

      A lire le discours d'Emmanuel Macron lors du dîner annuel du CRIF, le lecteur se surprend à douter soudain de la maîtrise sémantique du Chef de l'Etat... En effet, devant un parterre de plus de 1 000 invités munis d’un badge « Tous unis contre l’antisémitisme », Emmanuel Macron a accédé à la demande formulée quelques minutes plus tôt par Francis Kalifat en annonçant que la France allait adopter dans ses textes de référence la définition de l’antisémitisme validée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA), c’est-à-dire élargie à l’antisionisme, « une des formes modernes de l’antisémitisme », a souligné le chef de l’Etat, sans pour autant« empêcher ceux qui veulent critiquer la politique israélienne de le faire » ni « modifier le code pénal », a-t-il précisé. Cela s'appelle la quadrature du cercle !!!

   Pour faire simple, l'"antisionisme" est défini par le dictionnaire Larousse comme "l'Hostilité à l'existence ou à l'extension de l'État d'Israël", et donc comporte deux degrés: premier degré, la dénégation pure et simple de l'état d'Israël, jugé comme une aberration et une nation artificiellement implantée dans cette géographie, et second degré, le fait de s'opposer à la politique impérialiste, belliciste et d'extension territoriale de l'état d'Israël lorsque c'est le cas, notamment en ce moment. Il y a cependant une énorme distance entre militer contre la politique impérialiste d'un Natanyahu sans pour autant remettre en question l'existence d'Israël et la position revenant à contester l'existence de l'état d'Israël lui-même ! Si l'équation formulée par le Chef de l'Etat lors tde ce discours s'applique, à savoir "antisionisme" = "antisémitisme", on voit mal comment, dès lors,  "ceux qui veulent critiquer la politique israëlienne" pourraient demeurer libres de le faire sans être aussitôt taxés d'antisémitisme, ce qui demeure, au passage, un grave contre-sens... Le Chef de l'Etat ne peut s'amuser à changer ainsi le sens des mots au gré des événements ! Cela ne s'est jamais vu que sous les pires dictatures... Là où cela fait d'ailleurs confiner ce genre de proposition à l'absurde, c'est quand on réalise que d'assez nombreux juifs et même israëliens se verraient du même coup taxés d'antisémitisme puisque refusant la politique israëlienne dans les colonies et face aux Palestiniens ! Comme l'eût dit un de nos précédents locataires de l'Elysée, il faudrait vraiment "raison garder"  ! Pour preuve de tout ceci, des prises de paroles de juifs antisionistes:

et un exemple célèbre, entre beaucoup d'autres, de juifs antisionistes manifestant à Londres en 2015:

 Gageons que l'épouse du Chef de l'Etat ne devait pas être un si bon professeur de Lettres que cela, ou plutôt que son influence sur le petit Emmanuel est bien maigre, pour que nous assistions à de telles acrobaties sémantico-linguistiques de sa part ! Au-delà de ses intentions, que nous présumerons bonnes, comment pourtant passer sous silence sa gaffe énormissime ("La honte doit changer de camp") qui sous-entend que les juifs - pourtant qualifiés par le général De Gaulle de "peuple fier" - seraient dans le camp de la honte ou ressentiraient ce sentiment, alors que rien ne le laisse envisager ni ne le justifie ?! S'il n'écrit pas ses discours lui-même, il serait bien inspiré de changer de plume... S'il en est l'auteur, c'est simplement déplorable de s'être satisfait de cette facilité de langage blessante pour ceux à qui il était censé rendre hommage.

   Quant aux mesures de rétorsion envisagées pour régler les débordements sur Internet, ils font franchement sourire tout le monde... Si Internet est réglementable, l'application de sa réglementation relève de l'impossible, du moins tant que nous vivrons sous un régime qui respecte un tant soit peu les libertés pour lesquelles se sont battus nos aïeux et nos pères, les libertés d'expression, de communication notamment !

     Bref, nous nous trouvons encore face à une instrumentalisation des événements et de l'actualité dans toute sa splendeur, dans une phase de manipulation des foules et de diversion, destinée à faire oublier la situation et l'atmosphère revendicatives du peuple français, de notre Nation, vis-à-vis desquels ce pouvoir ne manifeste toujours pas l'attention, la considération, la bienveillance souhaitables et souhaités. Qui a écrit que les pouvoirs sourds voguaient tous à leur perte ?